vendredi 5 avril 2013

LE FORUM SOCIAL MONDIAL ET LES REVOLUTIONS DU PRINTEMPS ARABE

Avec les révolutions de la dignité qui ont commencé en Tunisie en Janvier 2011, davantage de « maturité » a été acquise par le Forum social mondial, qui est passé d’une position traitant des préoccupations de la société civile en rapport avec la mondialisation et prônant inlassablement qu’ « un autre monde est possible », à un espace de débats pouvant désormais  se prévaloir d’un vécu révolutionnaire, qui prouve concrètement -si besoin est- que le changement est bien possible. Et, même si le processus des révolutions est toujours en cours, de tels évènements ont valeur d’exemples, éloquents à plus d’un titre.

D’abord, parce que ces révolutions sont imputables essentiellement aux effets dévastateurs du système néolibéral, arrivés à leur paroxysme, qui ont généré des soulèvements violents et incontrôlés. Elles sont dues -avant tout- à l’absence d’équité sociale, le système ayant longtemps décidé d’enfermer les exclus sociaux dans un monde souterrain dont ils ne devaient affleurer. C’était sans compter avec ce torrent des révolutions, qui a tout emporté sur son passage, pour restituer à ces populations exclues leur « dignité ».

Ensuite, pour l’évolution inattendue que connaissent ces révolutions, avec un cheminement non linéaire, semé d’embûches. A l’origine de cette situation est en grande partie la sempiternelle lutte entre les deux mondes, celui du néolibéralisme et celui du paradigme altermondialiste.
Le premier - ancré depuis de très longues années dans la majeure partie de la planète- cherche à conserver bec et ongles ses acquis, qui sont le gage de sa continuité. Il doit à tout prix maintenir sa prépondérance, non seulement sur le monde riche (qui lui est naturellement acquis), mais aussi et surtout sur le monde pauvre. Car ce monde pauvre, qui est jusqu’ici le moins pillé par ses indigènes -non moins convaincus par le néolibéralisme- qui ne disposent pas de moyens pour le faire, constitue une extension nécessaire pour doper la croissance du monde riche : matières premières à bas prix, débouchés commerciaux pour des produits souvent inutiles, exploitation des ressources humaines et matérielles locales, etc. Cette prépondérance du néolibéralisme doit pérenniser à jamais l’emprise du système sur un monde pauvre avili, précarisé, surendetté, obéissant au doigt et à l’œil, autant de leviers pour maintenir cette dépendance immuable.
A l’opposé, on trouve l’alter-mondialisme, qui privilégie l’humain sur le matériel et se voulant le véhicule de toutes les valeurs d’équité qui sont les siennes depuis Porto Alegre. On imagine l’amplitude du choc …

Aujourd’hui est un moment unique de l’histoire, car ces révolutions sont autant de tests grandeur nature qui se font au fil de l’eau et les mutations subies par les pays concernés rappellent plus les champs d’expérimentation que les ateliers d’application de solutions toutes faites, qui en fait n’existent pas. Des facteurs endogènes et exogènes y participent. Des luttes d’ailleurs y sont continuellement injectées. Bref, les peuples révolutionnaires s’y sentent quelque part égarés et ne devraient pas être abandonnés à leur sort par leurs semblables, porteurs des mêmes valeurs. En l’occurrence, le FSM devrait baliser la route à ces téméraires, qui ont osé défier l’ordre établi, vaincre la résignation. Il y gagnerait en passant de plain pied au cran supérieur, pour affirmer haut et fort qu’« un autre monde existe ».